Pierre-Alexandre – Fierté
Alors ça, c’est l’histoire, ‘fin c’est l’histoire… c’est euh.. c’est euh… un moment très important de ma vie.
Euh… c’est le départ de mon… le départ de mon fils Lucien, euh… du.. du foyer.. du foyer familial. Voilà.
Il s’est passé y a… y a trois ans maintenant. Euh… faut dire que le.. voilà, j’ai.. j’ai eu deux enfants avec euh.. avec une femme, mon ex-compagne : Lola et Lucien. Et euh… on s’est séparé en arrivant à Bruxelles. Donc ça fait maintenant.. ça fait maintenant douze ans que… que… une semaine sur deux, euh.. j’ai la garde des enfants. Des deux enfants. (…toux…) Je me suis euh.. entre-temps marié. Avec une euh.. une autre femme. Et on a décidé de.. de… de vivre séparément. On s’aime comme des dingues mais chacun a son appartement ou sa maison. Et donc, pendant toutes ces années, euh… j’ai élevé mes deux enfants euh.. enfin seul. Oui, pratiq.. pratiquement seul. Et euh.. Et donc voilà. Tou.. Tout se passe comme une vie normale euh.. de une semaine sur deux. Une semaine vacances, une semaine avec enfants, une semaine vacances, une semaine avec enfants.
Et puis euh… la scolarité de Lucien euh se passe bien. Très bien même. Superbement bien. Il finit ses humanités il y a trois ans. Et euhm… à Jette. Avec euh, il avait.. pris math fort. Donc, il s’était plutôt dirigé vers quelque chose de.. de scient… de scientifique. De.. ‘fin pour continuer, pour continuer ses études en.. à la fac ou… Enfin voilà ici sur.. sur Bruxelles. C’est.. c’est ce.. c’est ce que l’on pensait quoi, euh… Et puis euh, ce grand nigaud, euh.. voit un jour une émission sur les Compagnons du Devoir et euh, il était… il ch.. il cherchait.. il cherchait ce qu’il voulait faire exactement. Et puis, il tombe là-dessus quoi! Et en… en quinze jours, il prend sa décision. Il dit “je veux devenir Compagnon” euh.. “j’veux devenir Compagnon du.. du Devoir et faire.. et être métallier”. Alors bon, nous parents.. ‘fin… sa mère, qui est restauratrice en.. en céramique euh et faïence euh.. et moi qui suis euh.. sérigraphe.. mais qui br.. j.. j’bricole énormément. Je.. je.. j’ai beaucoup travaillé pour donc mon ex-compagne.. euh… Nos enfants ont toujours vu.. nous ont toujours vu bricoler, travailler avec nos mains. Donc, je comprends.. je comprends que Lucien ait euh.. ait d’un seul coup, s’est dit “mais pourquoi faire des études.. de physique, de.. de… Pourquoi, pourquoi faire ça? …J’ai env.. j’ai envie de faire quelque chose avec mes mains.” Et euh… moi j’étais super fier qu’il prenne cette, ‘fin qu’il prenne cette voie. Et euh… sa mère aussi. Euh, sa mère aussi qui elle a fait de.. pas.. ‘fin beaucoup d’études quoi et euh… mais elle disait “ben oui p.. pourquoi pas quoi? Essaye.. fais.. fais ce que t’as envie de faire. Fais ce que t’as envie de faire. Et nous, on te suivra toujours.” Le p’tit truc par contre, c’est que.. les Compagnons du Devoir c’est euh.. c’est en France et euh… et euh… et ça voulait dire, ben, qu’il devait partir. Partir euh.. partir travailler, et en même temps étudier, et euh… On s.. on s’prépare en tant que.. en tant que parents à.. à ça. J’crois que de toute.. enfin toute sa vie, à partir de la naissance, on.. on s’dit “oui, le jour où il partira… où ils partiront, ben, on va s’retrouver seuls.” Mais c’est vrai que quand ça arrive, euh… ben là y a un mo.. y a vraiment un.. y a un moment qui est euh… qui est.. qui est compliqué, qui est très dur, qui est intense. Et euh… et on n’y croit.. enfin, on n’y croit pas…, si… on.. on.. on freine pour que ça n’arrive pas mais ça arrive quoi. Et ça, c’… c’est c’qui s’est passé. Donc avec Lucien qui euh… donc décide.. au mois de… juin de.. faire les Compagnons… Et part au mois de septembre chez les Compagnons euh.. Donc c’est.. ça.. ça a été, même si on.. si on s’y prépare, ça a été quand même quelque chose de court. Ça a été deux mois où.. où euh.. où c.. comme.. comme nous sommes séparés, ben, il a dû passer du temps là, du temps là, des vacances à tel endroit. Et puis.. et puis pour lui c’était la course parce qu’il avait aussi tous ses copains euh.. bah qu’il quittait. S.. s.. ses longs, longs copains. Donc c’était.. c’était.. ‘fin, il se rendait bien compte qu’il.. que quelque chose allait se passer et ça serait pas si simple que ça.
Et euhm… et le jour.. le.. le jour euh.. le jour tant attendu et tant euh.. et tant craint est arrivé. Euh.. à Bruxelles. A la gare du midi. Euh… Le jour de son départ. Et euh y avait… un copain à lui. Son meilleur.. son meilleur copain. Les autres n’avaient pas envie de.. de venir. Y avait Géraldine, donc mon ex… mon ex-compagne. L.. la..La maman. Et euh.. et moi. Mon épouse… nous avait dit “mais non, je s’rai pas là. C’est vraiment, c’est.. c’est votre bébé. Faut euh.. rester ensemble.” Et euh, et le.. le.. l’ami de Géraldine a.. a fait la même chose. Donc on s’est retrouvé.. à quatre. Euh, Géraldine, David le copain de Lucien, Lucien et moi. Et euh… à.. à attendre le train et puis euh.. et oui, à attendre le train et euh c’est très bizarre parce que… le temps parait très, très long… dans ces moments-là. Mais aussi tellement court. Parce qu’on s.. on.. on sent qu’on voit son môme.., pas pour la dernière fois, certainement pas, parce qu’i.. il va revenir. Il va.. il va revenir. Mais.. mais, il ne sera plus là… une fois sur deux. Il ne sera.. on ne pourra plus partager ses week-ends. On ne pourra plus partager ses.. ses euh.. ses p’tits problèmes, ses super plaisirs, ses… Pourquoi? Parce qu’il sera à mille kilomètres de là.. euh.. Parce que Lucien partait à Monte.. partait à Montpellier. Et.. ça a été un moment.. pour moi, de fierté. Parce que… mon fils.. commençait sa vie d’adulte. Avait fait le choix.. avait fait son choix. Qui n’était dicté par personne. C’est lui qui l’avait décidé. C’est lui qui euh était maître de son.. de son destin. Euh… Fier parce que.. notre éducation a fait que.. ben voilà, il.. il.. il était libre de.. de choisir. Y avait pas de.. y avait pas de.. de.. d’obligation de résultats. C’était simplement prendre du plaisir dans la vie et.. et faire ce que l’on a envie de faire. Et hem.. et puis très triste. Peiné parce que, comme je disais… c.. voilà.. j.. j’allais.. j’allais perdre mon p’tit bonhomme… qui allait… ben voilà qui.. qui allait partir euh.. et qui euh.. et je.. je savais au fond de moi que, une fois qu’il serait parti, ça ne serait plus jamais comme avant. Euh… Parce que l’éloignement f.. faisant, parce que.. parce que voilà, il commence sa vie de.. d’homme. C’est.. euh… C’est le.. Le sevrage est fini. (…rire…) Et.. et.. et donc, je.. j’allais me retrouver comme.. comme sa maman, euh seule avec ses doutes, ses émotions, ses.. ses angoisses, encore plus important parce que là il est loin. Et euh.. et.. et donc on.. on pense à ça. On pense vraiment à.. à.. à tout ça. Quand on est le.. quand on est.. le.. le long du quai. Quand on attend le train… On parle peu finalement. On parle, oui… Parce qu’il y a.. y a.. il y a ces longs blancs mais on n’a pas besoin de parler. Simplement… On a presque plus besoin de se toucher. Hem.. de se sentir. D’avoir ce c.. ce côté un p’tit peu.. Comme une sorte de.. d.. d’aur.. d’auréole.. autour. Et on n’a pas envie que ça s.. on n’a pas envie qu.. que ça se casse quoi et… Et le… C’qu.. Là où ça a été vraiment terrible, et.. super chouette mais euh.. le.. le TGV euh partait de… le TGV partait de Bruxelles. Donc, il était arrivé en gare. Il s’est formé. On a eu.. on savait qu’on avait 10 minutes encore devant nous pour pouvoir euh.. pour pouvoir se dire au revoir et euh… Et une chose qui m’a touché… (…hésitations…) et.. mê.. même quand j’en parle maintenant, j’ai.. j’ai touj.. toujours ces émotions… euh… Lucien.. est allé voir sa mère, l’a prise dans ses bras. L.. lui a dit un truc. Et ça, euh je ne l’ai pas entendu.
Il est allé ensuite vers moi. Et.. il m’a remercié, à titre personnel. Pas en disant “vous” mais en disant “Papa”. Euh.. “Je ne te remercierai jamais assez de ton éducation” quoi. Et ça, ça m’a fait… On s’est écroulé, hem.. on s’est écroulé. ‘fin, tous les deux et puis, Géraldine euh est revenue vers nous. Et c.. c’est.. ça f’sait, donc, ç.. ça faisait euh douze ans que je n’avais plus serré dans mes bras euh.. la.. la.. la maman de mes enfants quoi. Et ça a été un moment de (…toux…) d’énorme tristesse et de joie intense parce que c’était.. c’était deux émotions qui.. qui s’entremêlaient, qui se… Et euh, ça a été une.. un.. un des.. pareils.. au niveau.. au.. au niveau émotion pure, des plus euh.. des plus forts de ma vie. Euh avec.. avec la naissance de mes enfants (…toux…) et la mort de mes amis. Mais.. mais voilà, ça.. c’est l’même truc qui euh… c’est le… J’ai jamais vécu de.. d’autre émotion aussi forte.
Et euh… et le train est parti, hem..
Et le train est parti avec Lucien.. hem… Nous, on est resté avec notre chagrin et notre joie. (…toux…) Et puis euh.. et la vie continue et je suis… Les.. les mois qui ont… qui ont.. qui ont.. qui ont précédé, ont.. ont été euh.. ont ét.., non qui ont précédé, oui qui.. qui ont précédé, non qui ont succédé, pardon, ont été durs pour moi comme.. comme pour lui, comme pour Géraldine… Euh.. mais on était.. mais à chaque fois voilà qu’il.. qu’il revenait, on s’est.. on s’est rendu compte ben oui, que c’était devenu un homme, qu’il faisait sa vie, qu’il était euh.. qu’il était mature. Que tout ce qu’on lui avait appris, enfin qu.. qu’on lui avait appris, qu’on.. toutes les.. toutes les directions qu’on lui avait données pour réussir sa vie, pour faire s.., enfin pour faire.. pour faire dans.. dans sa vie ce.. ce qu’il pouvait faire l..le mieux, et ben, on s’est pas planté quoi!
C’est une… Et c’est un.. et ça, ça fait partie aussi de.. de ces bonheurs. Mais après. M..maintenant, ça fait trois ans qu’il est parti. Il a fait Montpellier, Le Mans, et là, il est à Nancy. Et euh.. bon, la tristesse quand il revient et quand il repart est là mais c’est plus.. c’est plus pareil.
Et on est.. enfin, je suis super content que.. qu’il soit complètement émancipé et euh.. et qu’il fasse ce qu’il a envie de faire dans sa vie, quoi.
Pierre-Alexandre – Fierté
Alors ça, c’est l’histoire, ‘fin c’est l’histoire… c’est euh.. c’est euh… un moment très important de ma vie.
Euh… c’est le départ de mon… le départ de mon fils Lucien, euh… du.. du foyer.. du foyer familial. Voilà.
Il s’est passé y a… y a trois ans maintenant.
Euh… faut dire que le.. voilà, j’ai.. j’ai eu deux enfants avec euh.. avec une femme, mon ex-compagne : Lola et Lucien. Et euh… on s’est séparé en arrivant à Bruxelles. Donc ça fait maintenant.. ça fait maintenant douze ans que… que… une semaine sur deux, euh.. j’ai la garde des enfants. Des deux enfants. (…toux…) Je me suis euh.. entre-temps marié. Avec une euh.. une autre femme. Et on a décidé de.. de… de vivre séparément. On s’aime comme des dingues mais chacun a son appartement ou sa maison.
Et donc, pendant toutes ces années, euh… j’ai élevé mes deux enfants euh.. enfin seul. Oui, pratiq.. pratiquement seul. Et euh.. Et donc voilà. Tou.. Tout se passe comme une vie normale euh.. de une semaine sur deux. Une semaine vacances, une semaine avec enfants, une semaine vacances, une semaine avec enfants.
Et puis euh… la scolarité de Lucien euh se passe bien. Très bien même. Superbement bien.
Il finit ses humanités il y a trois ans. Et euhm… à Jette. Avec euh, il avait.. pris math fort. Donc, il s’était plutôt dirigé vers quelque chose de.. de scient… de scientifique. De.. ‘fin pour continuer, pour continuer ses études en.. à la fac ou… Enfin voilà ici sur.. sur Bruxelles. C’est.. c’est ce.. c’est ce que l’on pensait quoi, euh…
Et puis euh, ce grand nigaud, euh.. voit un jour une émission sur les Compagnons du Devoir et euh, il était… il ch.. il cherchait.. il cherchait ce qu’il voulait faire exactement. Et puis, il tombe là-dessus quoi! Et en… en quinze jours, il prend sa décision.
Il dit “je veux devenir Compagnon” euh.. “j’veux devenir Compagnon du.. du Devoir et faire.. et être métallier”.
Alors bon, nous parents.. ‘fin… sa mère, qui est restauratrice en.. en céramique euh et faïence euh.. et moi qui suis euh.. sérigraphe.. mais qui br.. j.. j’bricole énormément. Je.. je.. j’ai beaucoup travaillé pour donc mon ex-compagne.. euh… Nos enfants ont toujours vu.. nous ont toujours vu bricoler, travailler avec nos mains. Donc, je comprends.. je comprends que Lucien ait euh.. ait d’un seul coup, s’est dit “mais pourquoi faire des études.. de physique, de.. de… Pourquoi, pourquoi faire ça? …J’ai env.. j’ai envie de faire quelque chose avec mes mains.” Et euh… moi j’étais super fier qu’il prenne cette, ‘fin qu’il prenne cette voie. Et euh… sa mère aussi. Euh, sa mère aussi qui elle a fait de.. pas.. ‘fin beaucoup d’études quoi et euh… mais elle disait “ben oui p.. pourquoi pas quoi? Essaye.. fais.. fais ce que t’as envie de faire. Fais ce que t’as envie de faire. Et nous, on te suivra toujours.”
Le p’tit truc par contre, c’est que.. les Compagnons du Devoir c’est euh.. c’est en France et euh… et euh… et ça voulait dire, ben, qu’il devait partir. Partir euh.. partir travailler, et en même temps étudier, et euh… On s.. on s’prépare en tant que.. en tant que parents à.. à ça. J’crois que de toute.. enfin toute sa vie, à partir de la naissance, on.. on s’dit “oui, le jour où il partira… où ils partiront, ben, on va s’retrouver seuls.” Mais c’est vrai que quand ça arrive, euh… ben là y a un mo.. y a vraiment un.. y a un moment qui est euh… qui est.. qui est compliqué, qui est très dur, qui est intense. Et euh… et on n’y croit.. enfin, on n’y croit pas…, si… on.. on.. on freine pour que ça n’arrive pas mais ça arrive quoi. Et ça, c’… c’est c’qui s’est passé. Donc avec Lucien qui euh… donc décide.. au mois de… juin de.. faire les Compagnons… Et part au mois de septembre chez les Compagnons euh.. Donc c’est.. ça.. ça a été, même si on.. si on s’y prépare, ça a été quand même quelque chose de court. Ça a été deux mois où.. où euh.. où c.. comme.. comme nous sommes séparés, ben, il a dû passer du temps là, du temps là, des vacances à tel endroit. Et puis.. et puis pour lui c’était la course parce qu’il avait aussi tous ses copains euh.. bah qu’il quittait. S.. s.. ses longs, longs copains. Donc c’était.. c’était.. ‘fin, il se rendait bien compte qu’il.. que quelque chose allait se passer et ça serait pas si simple que ça.
Et euhm… et le jour.. le.. le jour euh.. le jour tant attendu et tant euh.. et tant craint est arrivé. Euh.. à Bruxelles. A la gare du midi. Euh… Le jour de son départ. Et euh y avait… un copain à lui. Son meilleur.. son meilleur copain. Les autres n’avaient pas envie de.. de venir.
Y avait Géraldine, donc mon ex… mon ex-compagne. L.. la..La maman. Et euh.. et moi.
Mon épouse… nous avait dit “mais non, je s’rai pas là. C’est vraiment, c’est.. c’est votre bébé. Faut euh.. rester ensemble.” Et euh, et le.. le.. l’ami de Géraldine a.. a fait la même chose.
Donc on s’est retrouvé.. à quatre. Euh, Géraldine, David le copain de Lucien, Lucien et moi. Et euh… à.. à attendre le train et puis euh.. et oui, à attendre le train et euh c’est très bizarre parce que… le temps parait très, très long… dans ces moments-là. Mais aussi tellement court. Parce qu’on s.. on.. on sent qu’on voit son môme.., pas pour la dernière fois, certainement pas, parce qu’i.. il va revenir. Il va.. il va revenir. Mais.. mais, il ne sera plus là… une fois sur deux. Il ne sera.. on ne pourra plus partager ses week-ends. On ne pourra plus partager ses.. ses euh.. ses p’tits problèmes, ses super plaisirs, ses… Pourquoi? Parce qu’il sera à mille kilomètres de là.. euh.. Parce que Lucien partait à Monte.. partait à Montpellier.
Et.. ça a été un moment.. pour moi, de fierté. Parce que… mon fils.. commençait sa vie d’adulte. Avait fait le choix.. avait fait son choix. Qui n’était dicté par personne. C’est lui qui l’avait décidé. C’est lui qui euh était maître de son.. de son destin. Euh…
Fier parce que.. notre éducation a fait que.. ben voilà, il.. il.. il était libre de.. de choisir. Y avait pas de.. y avait pas de.. de.. d’obligation de résultats. C’était simplement prendre du plaisir dans la vie et.. et faire ce que l’on a envie de faire.
Et hem.. et puis très triste. Peiné parce que, comme je disais… c.. voilà.. j.. j’allais.. j’allais perdre mon p’tit bonhomme… qui allait… ben voilà qui.. qui allait partir euh.. et qui euh.. et je.. je savais au fond de moi que, une fois qu’il serait parti, ça ne serait plus jamais comme avant. Euh… Parce que l’éloignement f.. faisant, parce que.. parce que voilà, il commence sa vie de.. d’homme. C’est.. euh… C’est le.. Le sevrage est fini. (…rire…) Et.. et.. et donc, je.. j’allais me retrouver comme.. comme sa maman, euh seule avec ses doutes, ses émotions, ses.. ses angoisses, encore plus important parce que là il est loin. Et euh.. et.. et donc on.. on pense à ça. On pense vraiment à.. à.. à tout ça. Quand on est le.. quand on est.. le.. le long du quai. Quand on attend le train…
On parle peu finalement. On parle, oui… Parce qu’il y a.. y a.. il y a ces longs blancs mais on n’a pas besoin de parler. Simplement… On a presque plus besoin de se toucher. Hem.. de se sentir. D’avoir ce c.. ce côté un p’tit peu.. Comme une sorte de.. d.. d’aur.. d’auréole.. autour. Et on n’a pas envie que ça s.. on n’a pas envie qu.. que ça se casse quoi et… Et le… C’qu.. Là où ça a été vraiment terrible, et.. super chouette mais euh.. le.. le TGV euh partait de… le TGV partait de Bruxelles. Donc, il était arrivé en gare. Il s’est formé.
On a eu.. on savait qu’on avait 10 minutes encore devant nous pour pouvoir euh.. pour pouvoir se dire au revoir et euh… Et une chose qui m’a touché… (…hésitations…) et.. mê.. même quand j’en parle maintenant, j’ai.. j’ai touj.. toujours ces émotions… euh… Lucien.. est allé voir sa mère, l’a prise dans ses bras. L.. lui a dit un truc. Et ça, euh je ne l’ai pas entendu.
Il est allé ensuite vers moi. Et.. il m’a remercié, à titre personnel. Pas en disant “vous” mais en disant “Papa”. Euh.. “Je ne te remercierai jamais assez de ton éducation” quoi. Et ça, ça m’a fait… On s’est écroulé, hem.. on s’est écroulé. ‘fin, tous les deux et puis, Géraldine euh est revenue vers nous. Et c.. c’est.. ça f’sait, donc, ç.. ça faisait euh douze ans que je n’avais plus serré dans mes bras euh.. la.. la.. la maman de mes enfants quoi.
Et ça a été un moment de (…toux…) d’énorme tristesse et de joie intense parce que c’était.. c’était deux émotions qui.. qui s’entremêlaient, qui se… Et euh, ça a été une.. un.. un des.. pareils.. au niveau.. au.. au niveau émotion pure, des plus euh.. des plus forts de ma vie. Euh avec.. avec la naissance de mes enfants (…toux…) et la mort de mes amis. Mais.. mais voilà, ça.. c’est l’même truc qui euh… c’est le… J’ai jamais vécu de.. d’autre émotion aussi forte.
Et euh… et le train est parti, hem..
Et le train est parti avec Lucien.. hem… Nous, on est resté avec notre chagrin et notre joie. (…toux…) Et puis euh.. et la vie continue et je suis… Les.. les mois qui ont… qui ont.. qui ont.. qui ont précédé, ont.. ont été euh.. ont ét.., non qui ont précédé, oui qui.. qui ont précédé, non qui ont succédé, pardon, ont été durs pour moi comme.. comme pour lui, comme pour Géraldine… Euh.. mais on était.. mais à chaque fois voilà qu’il.. qu’il revenait, on s’est.. on s’est rendu compte ben oui, que c’était devenu un homme, qu’il faisait sa vie, qu’il était euh.. qu’il était mature. Que tout ce qu’on lui avait appris, enfin qu.. qu’on lui avait appris, qu’on.. toutes les.. toutes les directions qu’on lui avait données pour réussir sa vie, pour faire s.., enfin pour faire.. pour faire dans.. dans sa vie ce.. ce qu’il pouvait faire l..le mieux, et ben, on s’est pas planté quoi!
C’est une… Et c’est un.. et ça, ça fait partie aussi de.. de ces bonheurs. Mais après. M..maintenant, ça fait trois ans qu’il est parti. Il a fait Montpellier, Le Mans, et là, il est à Nancy. Et euh.. bon, la tristesse quand il revient et quand il repart est là mais c’est plus.. c’est plus pareil.
Et on est.. enfin, je suis super content que.. qu’il soit complètement émancipé et euh.. et qu’il fasse ce qu’il a envie de faire dans sa vie, quoi.
A propos de cette rencontre
Pierre-Alexandre est musicien, amateurs de tableaux, ceux de Hanan Bouanani ou de Franck Volo, et globalement, plutôt habiles de ses mains.
Il bosse comme sérigraphe chez un de mes clients.
On s’y est croisé quelques fois, notamment lors de l’une ou l’autre formation que je donnais en rapport avec leurs outils informatiques.
Pas de liens particuliers mais, comme qui dirait, nous nous avions à la bonne! Et nous étions « amis » sur Facebook (je mets toujours des guillemets à « amis » quand il s’agit de Facebook).
J’ai donc été très agréablement surpris lorsque j’ai reçu, via Facebook, un message me notifiant qu’il voulait participer à mon projet photo.
Ca a donné un bien joli moment au coeur duquel se retrouve délicatement exprimée la fierté d’un père.